A vous le relais : Elise Chabbey

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En 2012, elle participait aux Jeux Olympiques de Londres dans la discipline canoë-kayak slalom. En 2019, elle évolue au sein de l’équipe féminine UCI WorldTour Bigla Pro Cycling. Entre deux, en 2018, elle termine notamment troisième sur le parcours « vertical » du fameux Matterhorn Ultraks et prend une quatrième place aux championnats du monde de kilomètre vertical. Ah oui, sans oublier qu’à côté de tous ces exploits sportifs, elle poursuit également des études de médecine humaine à l’Université de Genève.

Non, il ne s’agit pas d’une petite soeur cachée de Kilian Jornet, bien que ses caractéristiques extra-terrestres puissent nous le faire penser, mais d’une jeune athlète genevoise âgée de 26 ans et dont le nom ne peut que vous être connu : nous avons nommé, Elise Chabbey. En admiration face à cette force de la nature, nous sommes allés à sa rencontre.

Elise, tout d’abord, félicitations pour ton passage en WorldTour. S’il s’agit d’une véritable progression dans ta carrière sportive, nous imaginons également que cela implique de nombreux changements pour toi. Quels sont ceux qui t’ont le plus marquée ? Dois-tu t’entraîner davantage ? Est-ce désormais plus difficile pour toi de concilier sport, études et vie sociale ?

Au fond, ma vie de tous les jours n’a pas beaucoup changé. Juste le fait que avant, j’en faisais qu’à ma tête et que mon entraînement n’était pas du tout structuré. Quand j’avais peu de temps, j’allais courir, en hiver je ne faisais que du ski de fond et quand j’avais un après-midi de libre, je sortais le vélo.

© Instagram Elise Chabbey

Depuis cette année c’est un peu différent; je suis des entraînements précis que Loïc, mon coach, me dit de faire. C’est donc du travail beaucoup plus qualitatif. De plus, je suis suivie par l’entraîneur national ainsi que par le manager de mon équipe qui regardent ce que je fais, tant au niveau entraînement que récupération, nutrition, etc…

Tu as déjà pu t’illustrer sur les fameuses « Classiques ». Comment se sont passées celles-ci et comment les as-tu vécu sportivement et humainement ?

C’était une magnifique quinzaine pour moi. Ces courses sont magnifiques et comme elles sont en commun avec les hommes, il y a plein de spectateurs et de fans qui sont toujours autour de nous.

On est très sollicitées. Durant ces courses, j’ai vraiment appris à travailler pour Cille, ma leader. L’esprit d’équipe est vraiment présent et le sentiment d’avoir tout donné pour quelqu’un est tout aussi gratifiant que de gagner soi même. Je n’ai jamais eu carte blanche pendant ces Ardennaises mais j’ai quand même réussi à faire de belles places, ce qui me motive pour la suite de la saison.

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Evoluer dans le monde professionnel cycliste implique de nombreux sacrifices, que cela soit au niveau affectif, nutritionnel, charges d’entraînement, etc… Qu’est-ce que tu considères le plus difficile par rapport à une vie « normale » ?

Pour l’instant je vis plus ou moins comme avant, étant donné que je finis encore mes études de médecine cette année. J’ai donc un statut spécial dans l’équipe et le manager est conscient que je ne peux pas être présente sur toutes les compétitions. Je n’ai pas l’impression de faire beaucoup de sacrifices, le jour où cela sera le cas, je poserais sûrement mon vélo.

Kayak, trail puis cyclisme. Racontes-nous comment tu as transité entre ces différents sports pour finalement venir pleinement t’épanouir dans le monde des deux roues ?

Je viens d’une famille de kayakistes, c’est pourquoi je suis venue en premier lieu à ce sport. Je suis restée en équipe suisse de nombreuses années et j’ai pu me sélectionner pour les JO à Londres en 2012. Suite à cela, la fédération Suisse m’a payé une année en Australie pour m’entraîner mais malheureusement les résultats n’ont pas suivi l’année d’après. Mes parents voulaient que je commence des études et comme je fais les choses à fond, j’ai commencé la médecine et posé mon kayak.

© Instagram Elise Chabbey

En 1ère année de médecine, je n’avais que peu de temps, donc je prenais mes chaussures le soir et j’allais courir pour me changer les idées. J’ai fais quelques courses et avec de beaux résultats à la clé, c’est ainsi que j’ai eu la chance d’intégrer la team Scott Trail internationale. Malheureusement, je me blessais souvent, le vélo était alors un moyen de continuer à m’entraîner sans me blesser.

© David Gonthier

Mon copain faisant beaucoup de vélo, on allait parfois rouler ensemble. Un jour, j’ai entendu dire que Loïc Hugentobler (mon coach actuel) fondait une équipe de cyclisme féminine sur Genève, ça m’a intéressée et j’ai donc commencé à un peu plus rouler. J’ai fais de beaux résultats et de fil en aiguille je me suis retrouvée chez Bigla, une équipe professionnelle du WorldTour.

Que penses-tu des conditions des équipes WorldTour féminines ? Quels sont les points à améliorer selon toi ?

Tout d’abord les salaires, j’étais vraiment choquée de connaître les différences de salaires entre les différentes filles de l’équipe. Il y a vraiment un gouffre entre la leader et la porte-bidons. Je pense que le salaire minimum qui va être obligatoire en 2020 va vraiment faire du bien.

Ensuite, au niveau des re-transmissions télévisuelles, ce n’est pas encore ça et pourtant, je vous assure que le cyclisme féminin est bien plus tactique et intéressant que le cyclisme masculin.

Tu es maintenant en dernière année de ta formation en médecine humaine. Comment vas-tu concilier FMH et poursuite de ta carrière professionnelle ? Envisages-tu de te dédier uniquement au cyclisme ?

J’ai prévu de prendre une année pour me consacrer au vélo. Mon objectif étant de me rendre aux JO à Tokyo. Si j’y arrive, ça serait vraiment fou et sinon il y a d’autres choses dans la vie, dont un magnifique métier qui m’attend. Je suis donc engagée à Sion en médecine interne dès novembre 2021.

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Propos recueillis par Kelly Grilo

A vous le relais

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