Dans les montagnes du Kyrgyzstan : La Silk Road Mountain Race de Stefano

© Stefano Crepaz
© Stefano Crepaz

1’700 km et 27’000 mètres de dénivelé au travers des montagnes du Kyrgyzstan : tel est le parcours sur lequel se sont élancés les participants de la deuxième édition de la Silk Road Mountain Race le 17 août, parmi lesquels le genevois Stefano Crepaz âgé de 30 ans.

Lors de la première édition en 2018, sur la centaine de partants, seuls un tiers sont parvenus à l’arrivée. Aves ses chemins en gravier, ses single-tracks, des sommets au-delà de 4’000 mètres d’altitude et des températures allant de 10 degrés négatifs à 35 degrés celsius, ce challenge tout aussi physique que mental, met à rude épreuve les téméraires osant s’y frotter. Ici, pas de ravitaillement tous les 50 km ou de voiture balai. Sur la totalité du parcours, seuls trois checkpoints permettent aux coureurs de croiser l’organisation et de profiter d’un repas chaud. Curieux des motivations pouvant emmener quelqu’un à tenter une telle aventure, nous sommes allés à la rencontre de Stefano qui y participait pour la première fois.

Stefano, depuis quand pratiques-tu l’ultra-cyclisme ?

Cela fait maintenant 3 ans que je me suis lancé dans des courses et des tours de longue distance. Avant la Silk Road Mountain Race, j’avais uniquement participé à des événements sur une seule journée, tels que le Tour du Mont Blanc ou le Tour des Stations. A deux occasions, j’ai fait des voyages sur plusieurs jours, mais en rien comparables à celui-ci. 

C’était donc la première fois que tu te lançais sur une course en auto-suffisance aussi longue ?!

Affirmatif! Ce fut une grande première pour moi de sortir de la zone de confort européenne (je dirais même « occidentale ») et braver des conditions de courses impitoyables.

© Stefano Crepaz – Emplacement du premier checkpoint après 400 km

Comment t’entraînes-tu pour ce genre d’événements ? 

Mes entraînements ne sont pas vraiment structurés. Je n’ai pas de coach ni de structure qui me suit. À vrai dire, cette année, outre un long week-end de bikepacking en Suisse, je n’ai pas vraiment essayé de répliquer les mêmes conditions de vie qu’au Kirghizistan. En revanche, j’ai essayé de pousser la charge de l’effort plus loin afin d’entraîner mon corps à mieux supporter la fatigue, la déshydratation ou l’hypoglycémie. Cela s’est traduit par deux longs tours à vélo les week-ends avec une quantité conséquente de dénivelé (i.e. 260km et 6000m d+). En agrément, deux fois par semaine, le soir après le travail, j’ajoutais une séance d’1h30 d’effort anaérobique.

Ne craignais-tu pas tous les dangers qui peuvent survenir dans des zones aussi retirées que celles traversées en Kirghizistan ?

À vrai dire, en amont, pas spécialement. Certes, j’aime faire du vélo de manière conséquente, cela ne m’empêche pas de rouler avec un certain conservatisme, sans prendre de risques inutiles. Le fait d’être suivi par l’organisation grâce à une balise GPS me rassurait aussi. Un dot-watcher veillait nuit et jour sur moi et pouvait contacter l’organisation sur place en cas de comportement anormal de ma part (i.e. si ma position GPS venait à ne pas bouger pendant 1h en pleine journée ou si je venais à sortir de la trace de manière anormale).

De toute manière, tous les jours je me retrouvais en compagnie d’un (ou plusieurs) autre(s) coureur(s) avec lequel(s) je faisais un bout de chemin. Je n’étais, tout compte fait, jamais vraiment esseulé.

© Stefano Crepaz

Un facteur m’a principalement fait redescendre les pieds sur Terre: la météo. Je me suis fait une belle frayeur en passant en phase deux d’hypothermie au niveau du pied gauche: je le sentais tout chaud alors que j’avais perdu toute sensation au toucher. 

Quels sont les plus beaux souvenirs que tu gardes de cette course ?

La chose qui m’a le plus atteint est le côté sauvage du pays. On se rend compte que, malgré vivant sur la même planète, on vit dans des univers diamétralement opposés. Cela a remis en question pas mal de mes acquis de vie. Les liens d’amitié tissés tout au long de l’événement ont été un autre facteur clou de ce voyage. Le partage d’une expérience telle que celle-ci a proportionnellement décuplé l’intensité de l’amitié. Le laps de temps qui peut passer du statut d’” inconnu” à “ami pour la vie” est significativement raccourci! L’envie de les retrouver sur d’autres événements est grande!

© Stefano Crepaz

Qu’est-ce qui te plaît et t’attire dans ce format de courses ?

Le type d’effort ! On a de nombreux hauts et bas tout au long d’une course d’une semaine. Cela me convient particulièrement car je suis plutôt un “diesel”: je pars tranquillement et finis plus fort.

Tu prévois d’ores et déjà l’Italy Divide et le BikingMan Inca Divide pour l’année prochaine, il faut donc croire que les courses de bikepacking t’ont bel et bien plût ! Quels sont tes conseils et encouragements à tous ceux qui veulent découvrir cette approche du cyclisme ?

Il faut avant tout avoir la bonne philosophie, ne pas se forcer à aller vers ce genre d’événements, au risque de se retrouver dans une galère mentale… Si vous désirez découvrir un pays en bikepacking, il est déconseillé de participer à un format course: rouler de nuit pour gagner des places va vous procurer un certain stress (manque de sommeil) et vous empêchera de voir des paysages que vous auriez pu voir en ayant roulé la journée! 

Ne lésinez pas sur le matériel: on peut vite se retrouver dans des situations extrêmes avec du matériel inadéquat (i.e. un sac de couchage pas assez chaud peut vous créer de sacrés problèmes). Mieux vaut avoir trop sur soi que de se retrouver à manquer d’un accessoire ou un équipement. Enfin, parlez-en avec des personnes expérimentées, via des groupes Facebook par exemple. Comme source tierce, je conseille vivement le site web Bikepacking.com 

Merci à Stefano d’avoir pris le temps de répondre à nos questions à son retour en Suisse. N’hésitez pas à vous rendre sur son blog pour un récit détaillé de son aventure !

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