La lombalgie chez le cycliste

Pour ce nouvel article, j’ai fait le choix de m’attaquer à une thématique importante bien connue de tous et faisant beaucoup parler d’elle depuis de nombreuses années. Une thématique également très présente chez les cyclistes: les douleurs au bas du dos, plus connues sous le nom de lombalgie dans le domaine médical. C’est un sujet risqué car un grand nombre de théories, d’idées reçues et de fausses croyances gravitent autour de cette problématique.

En effet, au sein même du monde médical, les pratiques varient passablement ; nous n’avons pas tous les mêmes classifications, les mêmes méthodes de traitement et les mêmes approches. Je vais donc tenter de vous décrire la problématique sur la base de ce que l’on sait aujourd’hui, en vous exposant quelles peuvent être les causes et quelles seraient les pistes de traitements propre au cyclisme.

Définition et classification de la lombalgie

La lombalgie correspond à des douleurs situées au niveau du bas du dos, dans une zone allant de votre charnière thoraco-lombaire jusqu’au pli fessier, pouvant également provoquer des irradiations au niveau des jambes.

Il est essentiel d’avoir en tête que plus de 90% des personnes expérimentant un épisode de lombalgie sont atteint de lombalgie commune dite « non-spécifique », c’est à dire ne comportant pas de signe d’alerte et de gravité. Dans le jargon médical, nous nommons ces signes des « drapeau rouge ». Il en va du ressort du professionnel de santé d’évaluer leur présence ou non afin de définir la prise en charge adéquate.

Le deuxième élément essentiel à connaître est que 90% des lombalgies dites non-spécifiques évoluent favorablement vers une diminution, voir une disparition des symptômes en moins de 4 à 6 semaines. Cette information vous permettra dors et déjà d’appréhender de manière plus sereine un épisode de lombalgie. Pour résumé, dans une grande majorité des cas… pas de panique!

Dans certaines situations, il est vrai que les douleurs peuvent être fortes et très handicapantes. Cependant, l’intensité des symptômes n’est pas corrélée avec le degré de gravité de votre situation. Il est tout à fait possible d’avoir des douleurs évaluées à 10/10 sans présence de signe de gravité. En effet, la douleur (un peu comme notre capacité à encaisser de la charge, abordée dans les articles précédents), est régit par de multiples facteurs tels que : notre façon d’interpréter une problématique, notre niveau de stress et de fatigue, notre environnement social, nos expériences passées ou antécédents médicaux… et j’en passe. Une lésion tissulaire ou anatomique, dans le cadre de lombalgie, sera donc rare.

Mécanismes d’action et facteurs contribuants

La plupart du temps, le cycliste expérimentant des inconforts lombaires décrira des sensations de tensions et de douleurs dites « en barre » au niveau du bas du dos, le plus souvent suite à quelques heures de selle, lors de montées ou encore lors de sorties intenses (type cyclosportives). Actuellement, quelques hypothèses peuvent être émises quant aux mécanismes favorisant la survenue de lombalgies lors de la pratique du cyclisme. En voici quelques-unes.

Flexion lombaire prolongée

En vélo, nous adoptons une position de flexion au niveau de notre dos qui sera plus ou moins prononcée selon le type de vélo employé ou encore selon notre mobilité. Cette position de flexion lombaire prolongée pourrait être en lien avec la survenue de douleur au niveau du bas du dos. Loin d’être nocive, cette posture en flexion sera plus ou moins contraignante et supportée selon plusieurs facteurs :

  • Votre expérience (cycliste débutant vs expérimenté, nombre de kilomètres / année)
  • Votre mobilité (mobilité articulaire, extensibilité musculaire)
  • Le vélo sur lequel vous roulez (contre la montre, route, VTT, ville)
  • Ou encore le profil de parcours sur lesquels vous évoluez

Expérience

Selon votre niveau et votre expérience dans le cyclisme nous allons être plus ou moins capable de supporter cette position de flexion. Rappelez-vous vos premières sorties, votre premier 100 kilomètres, ou encore la reprise de longues sorties en début de saison… Quelques situations lors desquelles il sera plus facile de ressentir un inconfort lombaire. Notre capacité à supporter cette position évolue dans le temps et donc, le risque d’expérimenter une lombalgie sera plus ou moins grand.

Soyez à l’écoute de votre corps et respecter vos limites.

Mobilité

Cette position de flexion sera plus ou moins tolérée selon votre niveau de mobilité et d’extensibilité musculaire. En étant penché vers l’avant, vous sollicité la mobilité de votre bas du dos, de vos hanches et l’extensibilité musculaire de votre chaîne postérieure (muscles du dos, arrière de la cuisse, mollets). Plus vous serez penché vers l’avant, plus l’amplitude de mouvement devra être grande et plus le degré d’extensibilité musculaire devra être important. Une personne présentant un déficit de mobilité lombaire en flexion ou encore un manque de souplesse des muscles de l’arrières des cuisses (ischio-jambiers) aura plus de difficulté à supporter et à maintenir sa position sur un vélo.

Ne pas négliger les séances de mobilité / étirement… surtout avec un sport comme le cyclisme qui aura tendance à limiter ces derniers.

Le vélo

  • Le degré de flexion lombaire sera également corrélé avec le type de vélo sur lequel vous roulez. En effet, vous adopterez une position beaucoup plus agressive sur un vélo typé « aéro » ou « contre la montre » comparé à un vélo de route typé « endurance » ou encore sur un vélo de ville
  • Une attention particulière sera donnée aux réglages apportés à votre vélo. Par exemple, plus la potence sera basse et proche du tube de direction, plus la potence sera longue ou encore plus la tige de selle sera haute, plus votre position sera dite « agressive ». Si vous n’y êtes pas habitué, il faudra respect un temps d’adaptation afin de ne pas surcharger votre bas du dos et augmenter le risque d’expérimenter des douleurs.

Roulez avec un vélo adapté à votre pratique !!!

Le profil de parcours

Plus le degré de pente sera important, plus vous aurez besoin d’être penché vers l’avant. Beaucoup de cyclistes rapportent donc une exacerbation des symptômes douloureux lorsqu’ils doivent faire de longues montées ou des pentes très raides. Il va être essentiel d’avoir un vélo ayant des réglages adaptés à votre pratique et à vos capacités de mouvements afin d’être capable de soutenir le dénivelé.

Adaptez le profil de vos sorties.

Autres facteurs de risque

Mais il n’y a pas que le vélo dans l’histoire. Aujourd’hui, de plus en plus de preuves scientifiques mettent en avant certain facteurs étant de forts prédicteurs de lombalgie tels que :

  • La qualité du sommeil
    • Très important lorsque l’on parle de vélo et notamment de récupération bien trop souvent négligée
  • Un haut niveau de stress soutenu
  • Un état dépressif
  • De l’anxiété.

Ces facteurs joueraient un rôle dans la sensibilisation de votre bas dos. Il sera donc plus facile d’expérimenter des douleurs lombaires en présence de ces éléments.

Il est essentiel de prendre du recul sur votre situation et votre état émotionnel dans le cadre d’une lombalgie. Certaines choses pourraient avoir plus de poids que vous ne le pensez.

Take Home Messages

  • Dans 90% des cas… pas de signe de gravité
  • Lors d’un épisode de lombalgie aigu -> un rétablissement à la normale dans les 4 à 6 semaines
  • Respectez vos capacités
  • Ayez un vélo réglé et adapté à vos besoins et votre pratique
  • Soyez attentif à votre état de fatigue, de stress
  • Ne pas négliger la récupération
    • Sommeil
    • Alimentation

Benjamin Coty

Le vélo pour Benjamin, c’est le plaisir avant tout. VTT, Route, Gravel, cyclocross… autant de disciplines qui lui permettent d’assouvir sa soif de challenge et de découverte. L’objectif… rentrer le sourire aux lèvres avec des belles images plein la tête !

Physiothérapeute du sport indépendant chez Physio Bike, Benjamin est spécialisé dans le suivi du cycliste au sein du centre médical Synergie / Medbase à Lausanne. Avec son associé Sébastien Talabardon, ils mettent leurs expertise et leurs compétences cliniques au profit de la santé des cyclistes et des triathlètes.

Vous pouvez suivre Benjamin sur LinkedIn, ou fixer un rdv ici pour physio ou ici pour une etude posturale. Retrouvez tous ses articles ici.