Lectures hivernales

Ca y est, l’hiver est bien là avec la tant attendue neige qui tombe jusqu’en plaine. Pas de quoi mettre un cycliste dehors (en tous cas pas moi) !

Du coup, on s’occupe autrement, en lisant des livres sur le cyclisme par exemple. Il y en a deux que j’ai adorés et que j’aimerais vous conseiller. Je les ai lu en italien, mais ils existent aussi dans d’autres langues.

  1. “Alfonsina e la strada” de Simona Baldelli.
  2. “Gino Bartali: Una bici contro il fascismo” de Alberto Toscano.

Le premiere livre, “Alfonsina e la strada” (“Die Rebellion der Alfonsina Strada” en allemand, la version française n’existe pas encore) est l’histoire d’Alfonsina Strada, la première femme à avoir couru le Giro d’Italia et le Giro di Lombardia. C’était une précurseure et elle a permis de donner de la visibilité au cyclisme féminin, même si beaucoup étaient sceptiques.

En effet, Alfonsina est née en 1891, à une époque où il était totalement interdit aux femmes de monter sur un vélo ! Celles-ci représentaient une manifestation du diable (merci l’église catholique !).

Mais quand son père récupère un jour un vieux vélo qui lui permettra d’aller travailler à la ville, Alfonsina ne rêve que d’une chose : monter sur cette bicyclette. Et c’est ainsi que la nuit, lorsque tout le monde dort, elle s’en va explorer les alentours au clair de lune, sur le vélo de son père.

Lorsque ce dernier découvre le manège nocturne de sa fille, il se met dans une grande colère, car ce vélo, c’est le bien le plus précieux de la famille, qui lui permet de rapporter de quoi se nourrir. Il ne faudrait surtout pas qu’Alfonsina l’abime. Mais Alfonsina y tient plus que son père à ce vélo et elle en prend grand soin.

Finalement, Alfonsina trouve la solution : elle propose de se rendre sur les marchés les dimanches pour vendre les travaux de couture qu’elle-même, sa mère et ses soeurs font durant la semaine. Soulignons qu’elle n’a que 10 ans. Puis, à l’âge de 13 ans, elle trouve un emploi fixe dans un atelier de couture de Bologne. Une aubaine, elle pourra prendre le vélo chaque jour !

C’est ainsi qu’avec ses premières petites économies, elle arrive à s’acheter un vélo d’occasion rien qu’à elle. Chaque jour, durant la pause de midi, elle voit plusieurs coureurs cyclistes amateurs qui s’entraînent sur la fameuse montée de la Montagnola, située juste devant son atelier. A peine son vélo acheté, elle profite également de cette heure de pause pour affronter la Montagnola. Jusqu’au jour où elle est repérée par Carlo Messori, un coureur professionnel qui deviendra son entraîneur. C’est ainsi que tout a commencé pour Alfonsina et que son rêve est devenu réalité.

Après avoir lu ce livre, je me sentais comme Alfonsina sur mon vélo : libre comme l’air ! Son mari lui disait toujours : « continue de pédaler, Alfonsina, ne t’arrête jamais, tu es si belle sur ton vélo » et c’est effectivement ce à quoi je pense, je me sens belle sur mon vélo, car je suis heureuse !

Le deuxième livre nous parle d’une face cachée de Gino Bartali: “una bici contro il fascismo”. (réd: l’édition française s’intitule “Un vélo contre la barbarie nazie – L’incroyable destin du champion Gino Bartali”).

Ce livre raconte comment, durant la 2e Guerre Mondiale, plus précisément entre 1943 et 1944, Gino Bartali a aidé et sauvé la vie de centaine de Juifs cachés dans les églises et couvents de la ville d’Assise, en parcourant quotidiennement les 200 km qui séparaient sa ville natale, Florence, d’Assise. Durant ces trajets, il trouvait l’excuse des entraînements en disant qu’à la fin de la guerre, la vie sportive reprendrait. Comme il avait des supporters un peu partout, également parmi les SS, il signait des autographes plutôt que de devoir montrer ses papiers. Et si quelqu’un s’hasardait à vouloir vérifier sa bicyclette, il se braquait en disant qu’elle était réglée au millimètre près et qu’il ne fallait surtout pas y toucher, au risque de tout dérégler et lui faire perdre des précieuses secondes en course. Bien évidemment, cela était un prétexte car en réalité, il transportait de faux passeports dans son tube de selle, qu’il amenait justement aux Juifs cachés au couvent d’Assise. Au retour d’Assise, c’étaient les photos des nouveaux rescapés à sauver qui se trouvaient dans le tube de selle pour permettre au typographe complice d’établir les faux papiers.

Il est à relever que Gino Bartali a pu continuer à « s’entraîner » car il a été réformé de l’armée, au vu de ses battements cardiaques trop faibles (entre 30 et 35 au repos !!!). Une aubaine pour lui qui a ainsi pu agir pour le bien.

Dans ce livre, qui mêle cyclisme et histoire, nous en apprenons plus sur l’histoire des vélos Wilier Triestina. En effet, le nom de cette marque était juste Wilier à la base. Le « Triestina » a été ajouté à l’occasion du Giro d’Italia de 1946, celui de la reprise d’après-guerre. En effet, à peine terminée le 2e Guerre Mondiale, le général Tito lorgnait sur Trieste pour l’annexer à la Yougoslavie, ce qui provoquait évidemment beaucoup de tensions entre les deux pays.

C’est pourquoi, une équipe constituée uniquement de coureurs vénitiens (de la région et pas de la ville) et frioulans, dont Giordano Cottur (originaire justement de Trieste), courut sous le nom de Wilier Triestina, histoire de rappeler que Trieste était et devait rester Italienne. Et c’est d’ailleurs Cottur qui gagna l’étape arrivée à Trieste, mais le Giro complet dut remporté par Bartali.

Aujourd’hui, la piste cyclable de Trieste est dédiée à Giordano Cottur et rejoint la Slovénie, symbole de la paix qui règne maintenant entre les deux pays.

Enfin, citons également un autre cycliste qui a fait l’histoire de l’Italie : Ottavio Bottechia (les vélos Bottecchia, vous connaissez ?). Ottavio Bottechia venait d’une famille très pauvre de la province de Trévise, en Vénétie.

Il a combattu durant la première Guerre Mondiale comme soldat à bicyclette, dans la brigade des « explorateurs d’assaut », équipés de vélos pliables. Il a été fait prisonnier par les Austro-Hongrois et s’est échappé avec son vélo, pour retourner sur le front Italien. A la fin de la guerre, il a reçu la médaille de bronze aux valeurs militaires.

C’est après la guerre qu’Ottavio a commencé les courses cyclistes, notamment le Tour de France. L’anecdote raconte que lorsqu’on lui a proposé de participer au Tour de France, il a accepté car comme ça, au moins, il pourrait manger à sa faim ! Il n’a pas seulement pu manger à sa faim, mais il l’a gagné ce Tour de France, en gardant le maillot jaune du premier au dernier jour !

Les récits d’Alfonsina, de Gino, d’Ottavio, de Giordano et de plusieurs autres cyclistes de cette génération ne parlent pas seulement de cyclisme, mais de l’histoire du peuple italien. En effet, ils nous rappellent cette Italie faite de paysans et de pauvreté, pour qui un vélo représentait une réelle opportunité d’une vie meilleure, à commencer par celle de trouver un travail en ville et ramener de quoi nourrir la famille.

Pour eux, les courses cyclistes passent au second plan et s’ils arrivent à en vivre, c’est tant mieux, mais c’était surtout l’amour pour le vélo et la nécessité de travailler qui les animait.

Voilà pourquoi l’histoire italienne est intimement liée à celle de la bicyclette et du cyclisme en général.

Faire du vélo et se souvenir de ce que cela a pu signifier pour mes aïeuls est le meilleur moyen que je puisse trouver pour rendre hommage à mes origines.

Katia Chianelli

Le vélo a toujours fait partie de la vie de Katia. Petite déjà, elle enfourchait son vélo pour partir sur les chemins de traverse et rouler juste pour le plaisir. Après, le vélomoteur, puis la voiture, la famille, et le travail lui ont fait délaisser le vélo pendant une période. Mais l’amour était si fort qu’il fallait bien qu’elle s’y remette. Au début, c’était juste pour les balades en famille au bord du lac. Puis elle a commencé à aller au travail à vélo. Ensuite, elle s’est acheté un VTT et s’est inscrite au Vélo Club d’Echallens. Elle y a appris la technique à VTT et découvert le bonheur d’être sur des chemins forestiers. Enfin, à force de faire la route pour se rendre au travail, elle a acquis un vélo de course, avec lequel elle a également découvert le plaisir de la route. Mais rouler seule, c’est ennuyeux alors elle a créé le groupe Bike For Fun sur Strava avec le soutien de Fast And Female. Les sorties de Bike for Fun ont lieu chaque dernier dimanche du mois et se terminent toujours par un moment sympa dans un petit bistrot ou tea-room du coin.