Les douleurs au genou chez le cycliste : Partie 2

Gestion des mécanismes d’action

Dans l’article précédent, j’avais introduit la notion de douleur au genou, une problématique fréquente dans le cadre de la pratique du cyclisme. J’avais ensuite énuméré (de manière non exhaustive) les principaux mécanismes d’action pouvant favoriser la survenue de telles douleurs ; les forces de compression, un déficit de contrôle moteur au niveau du genou ainsi que les forces d’étirement.

Selon le type de mécanisme impliqué dans la problématique, que peut-on donc entreprendre ? Quelles actions concrètes peut-on mettre en place ? Voici quelques pistes…

Les interventions qui seront décrites par la suite ne sont que des suggestions et ne remplacent en aucun cas l’expertise d’un professionnel de santé qui adaptera le choix des interventions sur la base d’un raisonnement clinique rigoureux. Dans le doute, allez consultez.

Forces de compression

Adaptation de l’entraînement

Pour commencer, assurez-vous d’avoir une charge d’entraînement adaptée, que ce soit en termes de kilomètres, de dénivelé positif ou d’intensité. Évitez les changements d’entraînement trop abrupts qui vous amèneraient à dépasser votre capacité à encaisser de la charge. Par exemple, je vois fréquemment des cyclistes rapportant des douleurs au genou suite à des sorties avec un dénivelé positif important ou suite à de nombreuses heures de selles. Il peut être intéressant de prendre le temps d’organiser sa semaine et ses sorties en fonction de sa forme du moment et de la période de la saison.

Adaptation du braquet

Vos développements devraient être adaptés à votre niveau et également au type de terrain sur lequel vous évoluez. Pour un cycliste débutant, si vous habitez aux Pays-Bas (où la terre est très, mais alors très plate), vous pourrez facilement vous permettre de mettre du gros braquet sans risque de surcharger vos genoux. Mais si vous habitez en Valais (gravé dans mon Coeur) et que votre route d’échauffement vous fait passer par Thyon 2000 tous les samedis matin… il sera peut-être intéressant de choisir une configuration plus « light » qui vous permettra de mouliner plus facilement et d’avaler le dénivelé sans devoir piocher à chaque coup de pédale. Le plus facile serait de modifier la taille de la cassette pour passer sur du 11/30, 11/32 voir 11/34. Passez voir votre marchand de cycle… il aura tout ce qu’il faut.

Adaptation de la cadence

Je l’avais déjà mentionné dans l’article précédent mais un petit rappel ne fera pas de mal ; Parlons donc de la cadence ! car cette dernière est l’un des facteurs de risque les plus importants en ce qui concerne les douleurs au genou. Un peu de physique pour commencer ; notre puissance (exprimée en watts) est le produit de la cadence (nombre de coup de pédale par minute) et de la force que l’on développe sur nos pédales ;

Force x Cadence = Puissance (watts)

Pour une même puissance, 200 watts par exemple, plus notre cadence sera basse (autours de 50-60 tours par minutes) plus on devra appliquer de la force sur les pédales pour atteindre ces 200 watts. On augmentera donc de manières très importantes les forces de compression et donc les risques de générer des douleurs. Dans un but préventif, préférez adopter une cadence plus élevée, autours de 80 à 90 RPM ! en d’autres termes… faut mouliner ! De plus, il a été démontré qu’un cycliste débutant adoptera naturellement une cadence de pédalage plus faible qu’un cycliste plus expérimenté ou professionnel. Chez les débutants, le risque de développer une pathologie de surcharge est donc plus haut car les forces de compression sont plus importantes.

Ajustement de la position de la selle

Ce réglage est primordial. C’est l’élément central du réglage de votre vélo. Une selle mal ajustée peut entrainer de multiples complications allant des douleurs au bas du dos, des engourdissements au niveau des mains, du périnée, des douleurs à la nuque et… des douleurs aux genoux. Dans le cadre de douleur à l’avant du genou, assurez-vous de ne pas avoir une selle trop basse, qui impliquerait une augmentation des forces de compressions via la tension du quadriceps sur la rotule.

Une méthode assez simple pour régler la hauteur de sa selle consiste à :

  • S’asseoir sur son vélo muni de ses chaussures de vélo
  • Placer ses talons sur les pédales
  • Pédaler à reculons
  • Si la hauteur est adéquate vous devriez avoir la jambe complètement tendue (éventuellement un très léger déhanchement vers le bas) lorsque votre pédale est en position basse à la verticale
    • Si la selle est trop haute ; un déhanchement sera nécessaire pour tendre la jambe
    • Si la selle est trop basse ; vous ne pourrez pas tendre votre jambe complètement

Le but serait d’avoir une flexion au genou de l’ordre de 30 à 40° maximum lorsque votre jambe est tendue lors du pédalage.

Forces d’étirement

Ce mécanisme concerne majoritairement les situations de douleurs à l’arrière du genou. En effet, les structures postérieures peuvent être mise sous tensions de manière importante dans la situation où la hauteur de selle serait trop haute et/ou que le recul de selle serait trop grand. La gestion de ce mécanisme d’action résidera donc dans un ajustement optimal du positionnement de votre selle. Pour ce faire, commencez par reprendre la marche à suivre ci-dessus afin d’ajuster la hauteur de votre selle.

Dans un deuxième temps, assurez-vous que le recul de votre selle n’est pas trop important. Pour cette étape, un simple fil à plomb vous permettra de faire cet ajustement en utilisant le « KOPS » ; Knee Over Pedal Spindle. Je m’explique ; assurez- vous qu’en étant assis sur votre vélo, les pédales à l’horizontale, vous ayez un axe vertical au niveau de votre jambe avant (représenté par le fil à plomb) passant par la pointe de votre rotule et plongeant directement sur l’axe de la pédale. Si cette droite passe en arrière de l’axe de votre pédale, le recul de votre selle est probablement trop grand.

Contrôle moteur du genou

Ce déficit de contrôle moteur pourrait engendrer une accumulation de contraintes répétées au niveau du genou favorisant l’apparition de blessures de surutilisation. Cependant ! Gardez bien en tête la dimension multifactorielle caractérisant ce type de blessure. De manière isolé, avoir un valgus dynamique (genou qui rentre en dedans) lors du cycle de pédalage ne sera très certainement pas la seule et unique cause des symptômes.

L’évaluation de ce mécanisme nécessitera l’examen clinique d’un professionnel de la santé afin de pouvoir mettre en avant les éventuels déséquilibres musculaires. Cependant, la réalisation d’un squat sur une jambe vous permettra déjà d’avoir une bonne idée si vous êtes capable de maintenir l’alignement de votre membre inférieur et de votre bassin dans l’axe afin d’éviter ce fameux valgus de genou (qui n’est pas nécessairement une mauvaise chose, j’insiste !!!). Cet exercice est également un très bon moyen de renforcer ses membres inférieurs.

La récupération

A mon avis, c’est probablement le point le plus important à respecter !!! En effet, le vélo est un sport où l’on aime se confronter à ses propres limites et se dépasser physiquement comme mentalement. Moyennant une période de récupération adéquate, le corps pourra se remettre de l’effort demandé et l’on préviendra la survenu de potentiels bobos. Le non respects récurrent de cette phase augmentera de manière importante le risque de blessure et les genoux sont fréquemment concernés. Retenez qu’une bonne qualité et quantité de sommeil et une alimentation saine vous permettra en grande partie de digérer votre charge d’entrainement sans encombre.

Voici quelques pistes qui pourraient vous aiguiller si vous éprouvez des douleurs aux genoux lors de la pratique du cyclisme. Cependant, ne laissez pas trop traîner ! Ce genre de petits bobos peut devenir très handicapant sur le long terme et de plus en plus difficile à s’en débarrasser. Dans le doute encore une fois, n’hésitez pas à consulter l’avis d’un professionnel de la santé.

En résumé:

  • Roulez intelligemment en organisant vos sorties selon votre niveau de forme
  • Respectez les phases de récupération
    • sommeil
    • alimentation
  • Réglez votre selle de manière optimale
  • Adaptez vos développements
  • Moulinez au-delà de 80 à 90 tours de pédale par minute

Benjamin Coty

Le vélo pour Benjamin, c’est le plaisir avant tout. VTT, Route, Gravel, cyclocross… autant de disciplines qui lui permettent d’assouvir sa soif de challenge et de découverte. L’objectif… rentrer le sourire aux lèvres avec des belles images plein la tête !

Physiothérapeute du sport indépendant chez Physio Bike, Benjamin est spécialisé dans le suivi du cycliste au sein du centre médical Synergie / Medbase à Lausanne. Avec son associé Sébastien Talabardon, ils mettent leurs expertise et leurs compétences cliniques au profit de la santé des cyclistes et des triathlètes.

Vous pouvez suivre Benjamin sur LinkedIn, ou fixer un rdv ici pour physio ou ici pour une etude posturale. Retrouvez tous ses articles ici.