Dans une série de trois articles, je m’attache à expliquer:
- Ce qu’est le ski de randonnée et quel matériel utiliser
- Pourquoi c’est un bon entraînement pour le vélo
- Où pratiquer le ski de randonnée, surtout lorsque l’on débute
2. Pourquoi le ski de randonnée?
En hiver, les cyclistes deviennent gros ou suivent un régime d’entraînement qui ressemble à de la torture. Ils roulent dehors dans des conditions absolument misérables ; et lorsqu’ils peuvent à nouveau sentir leurs doigts, ils se ruent sur leur smartphone pour publier des photos épiques sur les réseaux sociaux en prétendant qu’ils ont eu du plaisir.
Parfois, ils vont au fitness et ont l’air ridicule alors qu’ils essaient de soulever des poids avec leurs bras tout maigres. Ou pire encore, ils roulent à l’intérieur. OK, la technologie a sensiblement amélioré cette sinistre expérience ces dernières années ; maintenant, leur home trainer est connecté à des plateformes en ligne telles que Zwift où ils peuvent se retrouver virtuellement avec leurs amis et rouler « ensemble ». Ils montent, ils descendent et les risques de chute sont minimes. C’est plutôt bien fichu. Il n’en reste pas moins qu’ils transpirent comme des boeufs dans leur cave ou leur salon et qu’ils sont seuls pour savourer leur bière après l’entraînement.
Voilà à quoi ressemble l’hiver si vous êtes un cycliste, à moins que vous ne viviez :
- dans une région où cette saison n’est pas misérable, comme la Californie, le Brésil ou l’Andalousie. Vous avez de la chance ! Vous pouvez rouler toute l’année et le vêtement le plus hivernal que vous possédez est une paire de manchettes.
- Près des montagnes, qui sont aussi amusantes en hiver qu’en été.
Et, comme la plupart des Romands, je suis heureusement dans cette dernière catégorie. Je suis quand même un peu privilégié car je suis basé à Gryon, dans les Alpes vaudoises. En été, je peux enchaîner le Col de la Croix, le Col du Pillon et le Col des Mosses depuis chez moi. En hiver ? Les routes sont verglacées ou enneigées et je peux à peine rouler entre décembre et mars. Je suis allergique à tout ce qui touche au renforcement musculaire. La dernière fois que j’ai roulé à l’intérieur, c’était en 2013, lorsque je me suis cassé la clavicule.
Alors, qu’est-ce que je fais tout l’hiver ? Du ski de randonnée. C’est l’activité idéale pour moi. Comme beaucoup d’entre vous j’imagine, j’éprouve plus de satisfaction à escalader une montagne et à en atteindre le sommet qu’à la descendre. En anglais, on dit que je suis une “uphill person”. Et comme le vélo, le ski de rando consiste à gravir des montagnes. 80% d’une sortie est consacrée à la montée. Et par « montée », il faut entendre « raide » : à ski, des pentes de 30% sont courantes et un 10% s’apparente à du plat. C’est le rêve du grimpeur !
Et la descente ? Au mieux, il y a de la poudreuse et j’arrive en bas avec un immense sourire. Au pire, et c’est le plus souvent le cas, la neige est glacée, mouillée ou croûtée. Comme le matériel que j’utilise n’est pas fait pour la descente (rappelez-vous, tout est question de montée), rester debout se transforme en un entraînement de force pour les quads. Bingo.
Car oui, le ski de randonnée est une séance de renforcement musculaire combinée à un entraînement d’endurance qui permet en même temps de développer l’équilibre et la coordination. Sur une montagne. On travaille tout : les jambes, le tronc, les bras. Quand le printemps arrive, le haut de mon corps a même l’air à moitié décent (pour un cycliste). Du moins c’est ce que dit ma femme, et je le ressens quand je remonte sur le vélo. Je suis fort, mon dos ne me fait pas mal, et avril est la période de l’année où je réalise mes meilleurs temps sur des bosses courtes.
La plupart de mes sorties en ski de rando sont de courtes séances, du pas de ma porte à la Croix des Chaux, le sommet du domaine skiable de Gryon. Une heure de montée, 15 minutes de descente : l’entraînement idéal pour un père de famille pressé par le temps comme moi. Je dois bien y être déjà montée une trentaine de fois cette saison, c’est en quelque sorte ma version de Zwift.
Dans ma lointaine jeunesse, je faisais aussi quelques courses nocturnes. Le concept est simple : un vendredi soir, on monte une piste damée et on mange des pâtes dans un resto d’altitude. C’est une célébration de la douleur : 30 minutes à une heure d’effort maximum constant dans l’obscurité. Mais ces épreuves sont très populaires et attirent des dizaines de participants qui viennent pour l’effort, l’ambiance et les prix : en général, c’est du vin, du fromage et de la viande séchée (vous l’aurez deviné, la plupart se déroulent en Valais). Et croyez-moi, on se prend moins la tête que dans une cyclo.
Il m’arrive de faire des sorties plus longues en haute montagne. Ce sont des journées inoubliables dans la nature, lorsque les conditions le permettent et que je trouve des personnes plus expérimentées que moi pour choisir l’itinéraire et me guider. C’est aussi le moyen de préparer mon traditionnel objectif hivernal: le Trophée du Muveran, qui se déroule au début du mois d’avril à quelques kilomètres de chez moi. Je suis encore et toujours terrifié par le fameux (et pas si terrible) couloir du Pacheu, qui précède la fabuleuse descente vers Derborence. Ce n’est alors que le début de la véritable saison de ski de randonnée en haute montagne, mais je reste avant tout un cycliste et c’est le moment de remonter sur mon vélo. Je ne résiste pas à l’appel des primevères et du bitume sec…
Dans mon dernier article, j’expliquerai où pratiquer le ski de randonnée, surtout lorsque l’on débute .
Cet article est une adaptation d’un post paru sur le blog d’ALPSinsight.
Alain Rumpf
Cycliste passionné depuis plus de 35 ans, Alain Rumpf est bien connu sur les réseaux sociaux grâce à son compte « A Swiss with a Pulse » qui compte plus de 13’000 followers.
Dans une précédente vie, il a été coureur cycliste Elite et a travaillé 20 ans pour l’Union Cycliste Internationale. En 2014, il décide de quitter le confort d’un bureau pour devenir guide, photographe, rédacteur et consultant. Il collabore avec Suisse Tourisme, Haute Route, Scott, Apidura, Alpes Vaudoises, komoot, Vélo Magazine, Velocio et bien d’autres. Il dirige le site Switchback, un guide du vélo de route et du gravel dans les Alpes et au-delà. Découvrez ses projets sur son site www.aswisswithapulse.com et tous ses articles sur cycliste.ch.